QUELLE CONSTITUTION POUR QUELLE EUROPE ?
Résumé d'un article paru dans la Revue du Marché commun et de l'Union européenne (Mai 2001)

 



L'idée d'une constitution européenne est à l'ordre du jour. Il s'agit de clarifier les objectifs et l' architecture de l'Union avant un nouvel et considérable élargissement. Il s'agit aussi d'améliorer l'efficacité des institutions et de renforcer leur légitimité.

La première démarche à entreprendre devrait être de vérifier l'existence d'un accord suffisant sur des objectifs fondamentaux tels que la démocratie, la paix, l'ordre mondial, le modèle économique et social, l'équilibre régional, le développement durable, la sécurité dans tous ses aspects, le patrimoine et la diversité culturelle, les services universels. Cependant, chaque Etat membre doit conserver sa liberté de choix dans la limite de l'intérêt commun.
Rendre l'Europe capable d'agir et d'exercer une influence mondiale suppose d'en finir avec la contradiction qui consiste à assigner à l'Union des objectifs ambitieux sans la doter des compétences et des moyens d'action correspondant à cette ambition.

L' invention fâcheuse des " piliers " intergouvernementaux est à l'origine d'un éclatement de la fonction exécutive et de représentation. Les raisons invoquées pour maintenir la politique étrangère et de sécurité commune hors de la sphère communautaire ne résistent pas à l'examen. Doter l'Union d'un système de gouvernement cohérent peut se faire en renforçant la synergie entre la Commission et le Conseil dont les diverses formations devraient être mieux coordonnées. Pour exister et agir, l'Union doit disposer de la personnalité juridique internationale et de ressources à caractère fiscal lui permettant d'assumer ses tâches de souveraineté.

Rapprocher l'Europe des citoyens suppose à la fois un effort d'éducation et une réforme des institutions, concernant notamment le mode d'élection du Parlement et la légitimation de la Commission. La politique étrangère et de sécurité étant encore dans l'enfance, le temps n'est pas encore venu d'instituer un véritable gouvernement européen distinct des gouvernements nationaux. Une stricte séparation des compétences n'est pas souhaitable mais il appartient au Parlement européen et aux Parlements nationaux de s'opposer aux excès de réglementation imputables plus aux administrations nationales qu'à la Commission. La création d'un espace judiciaire et d'un Parquet européens doit répondre aux exigences de sécurité des citoyens.

L'élaboration d'une constitution européenne relève d'une procédure démocratique associant des représentants des Parlements nationaux, du Parlement européen, des Gouvernements et de la Commission et ouverte sur la " société civile ". A la recherche de l'unanimité à tout prix devrait être préféré l'octroi d'un statut dérogatoire aux pays qui ne pourraient accepter de nouveaux progrès dans la mise en commun des souverainetés. Mais veillons à ne pas donner le sentiment aux pays candidats qu'ils n'auraient pas leur place dans une avant-garde auto-proclamée. Seule l'auto-exclusion est envisageable.

Aux citoyens de s'approprier une Europe qui leur paraît nécessaire mais bien lointaine.

 


Robert TOULEMON
Président de l'AFEUR
Membre du BN du MEF