Télécharger ce texte au format PDF
Si vous ne disposez pas d'Acrobat Reader cliquez ici

 

 


CONTRIBUTION DU MOUVEMENT EUROPEEN
SECTION HAUTE-GARONE / ARIEGE




  Le vendredi 11 mai 2001 à 18h30, la section Haute-Garonne/Ariège du mouvement européen s'est réunie afin de débattre des différentes questions qui seront abordées par le Conseil national du 16 juin prochain.

1) La définition des politiques européennes

    Nous sommes persuadés qu'une répartition claire des compétences entre l'Union et les Etats membres est de plus en plus nécessaire. La question essentielle en Europe aujourd'hui est de savoir qui fait quoi, Et la réponse à cette question ne peut être apportée qu'en application du principe de subsidiarité, c'est à dire dans une recherche de l'efficacité.

    Il est normal que même dans une Europe plus intégrée, les Etats conservent des compétences exclusives dans certaines domaines, tel que l'éducation, la culture, la santé, le tourisme etc., même si ces différents politiques peuvent faire, l'objet d'un soutien de la communauté ( ce que prévoit d'ailleurs le traité de Maastricht.)
    En revanche dans d'autres secteurs c'est l'Europe qui doit détenir une compétence exclusive c'est le cas en matière de politique commerciale, de politique économique et monétaire, de politique de transport, et évidemment de politique agricole commune.     Cependant cette dernière est aujourd'hui au centre d'une controverse.
    La PAC fait en effet l'objet de certaines critiques : on lui reproche de coûter trop cher, d'être à l'origine des crises graves (telle que la vache folle ou la fièvre aphteuse) qui affectent la production animale et qui inquiètent particulièrement les consommateurs.

    Certains n'hésitent pas à dire qu'il faudrait " rationaliser la PAC " ( cf. projet Schröder.) Pour un des nos membres une telle évolution ne doit pas être exclue, pourvue que l'intégration puisse se poursuivre dans d'autres domaines.
    Mais pour une large majorité, la PAC est un instrument indispensable de l'intégration européenne, elle a d'ailleurs été à l'origine de celle-ci puisque pendant longtemps, elle a été la seule politique commune.

    Elle est de plus la manifestation la plus marquante de la solidarité communautaire. Il serait contradictoire de vouloir d'un coté poursuivre et approfondir la construction communautaire et de l'autre de mettre fin à la PAC.
    Une autre politique a été également au centre du débat : la politique de cohésion économique et sociale, elle aussi, expression de la solidarité, puisqu'elle consiste pour les régions les plus riches de la Communauté à aider les régions les plus pauvres, de façon à aboutir à une relative convergence des économies.     Sur ce point les avis sont moins tranchés et la renationalisation paraît plus plausible. Certains estiment en effet que cette politique entraîne une perte importante de temps et de moyens financiers puisqu'elle consiste pour les Etats membres à verser à Bruxelles des sommes qui leur reviennent ensuite sous la forme des subventions.     Ne serait il pas plus logique que les Etats définissent et financent, ce qu'ils font d'ailleurs en grande partie, leur politique régionale ? Il est vrai qu'a l'inverse, dans la perspective d'une intégration plus poussée, l'ensemble de la politique régionale et d'aménagement du territoire pourrait être transféré à Bruxelles…

    Enfin, l'ensemble des participants a été d'accord pour dire qu'il ne peut pas ne pas y avoir d'approfondissement de la politique étranger et de défense. Dans tout système de type fédéral ( cf. l'Allemagne ou les Etats Unis) la politique étrangère est définie au niveau de la fédération.     Cela signifie que la politique étrangère devrait être définie à la majorité qualifiée pour pouvoir devenir une véritable politique commune.

 

2) La Place de l'Europe dans le monde

    Elle doit s'affirmer à la fois sur le plan économique et politique.
    Sur le plan économique, l'Europe unie est devenue une véritable puissance, capable de rivaliser avec le Japon ou les Etats -Unis. La création de la monnaie unique depuis le 1er janvier 1999 et qui regroupe aujourd'hui 12 pays a encore renforcé le poids économique de l'Europe.

    C'est grâce à l'Euro que l'Europe a pu résister aux crises économiques les plus récentes et garder une certaine stabilité. Mais la gestion de l'Euro ne doit pas rester le monopole de la Banque centrale européenne. Il faudrait qu'une véritable autorité politique puisse décider de la politique économique et monétaire. Autrement dit, il faudrait mettre en place un véritable gouvernement économique de l'Europe.

    L'union européenne a également un rôle à jouer dans la régulation du processus de mondialisation . La     Communauté européenne a été associée aux négociations qui ont eu lieu dans le cadre du GATT au titre de la politique commerciale. Depuis la création de l'OMC en 1994, l'UE doit défendre la thèse d'une meilleure organisation du commerce mondial, et faire en sorte que les pays en développement ne soient pas les victimes du libre échange généralisé et du développement de l'économie de marché. Justement, par rapport à ces pays l'UE a un devoir d'aide et d'assistance.     Elle a déjà affirmé sa place originale, par la mise en œuvre des accords de Lomé, qui constituent un système d'aide économique original et important quantitativement ( beaucoup plus que l'aide américaine). Certes les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des espérances mais l'effort doit être poursuivi, c'est d'ailleurs l'objet de la convention de Cotonou signée le 22 juin 2000.

    Sur le plan politique, la place de l'Europe dans le monde, n'est pas pour instant au niveau de son influence économique, il est courrant de dire que l'Europe est un géant économique et un nain politique. Pour affirmer sa place politique, l'Europe doit d'abord défendre son système de valeurs. Elle a de ce point de vue un message à délivrer aux autres pays du monde. Ces valeurs ont été récemment affirmées dans la chartre des droits fondamentaux de l'Union, adoptée solennellement à Nice. Certes, elles ne sont pas fondamentalement distinctes des valeurs du monde occidental, dans son ensemble mais elles peuvent présenter une certaine originalité.     C'est le cas en particulier de la mise en œuvre de ce qu'il est convenu d'appeler le " modèle social européen ".     De plus, dans sa politique étrangère, l'Union doit veiller, comme le traité le prévoit au respect des droits fondamentaux, de la démocratie et de l'état de droit.

    Justement, l'affirmation de la place de l'Europe dans le monde passe inévitablement par l'affirmation d'une politique étrangère commune et d'une politique de défense. La politique étrangère doit être clarifiée et simplifiée. Elle doit être plus lisible. Actuellement il y a beaucoup de confusion en la matière : plusieurs personnalités sont habilitées à parler au nom de l'Europe : le secrétaire général du Conseil ( M. PESC), mais aussi le commissaire chargé des relations extérieures et le Président en exercice du Conseil… Cela nuit particulièrement à l'affirmation de l'identité de l'UE dans le monde.


    La défense européenne doit également être développé. Des progrès importants ont été faits depuis 1998( réunion franco-britannique du Saint Malo).     Ils doivent être poursuivis, pour qu'elle soit plus lisible pour les citoyens, il faudra qu'on la définisse comme un véritable instrument de défense du territoire européen et pas seulement un instrument de gestion des crises pouvant éclater sur le continent.

 

3) Le processus décisionnel dans la Communauté

    Le traité de Nice était censé améliorer le fonctionnement des institutions, pour permettre de décider plus efficacement dans une Europe à 27. Or, il constitue de ce point de vue un échec incontestable.

Tout d'abord, il n'a pas permis l'extension souhaitable de la règle de vote à la majorité qualifiée. Certes une trentaine d' articles ont été modifiés dans ce sens (remplacement de l'unanimité par la majorité qualifiée) mais les domaines essentiels ne sont pas concernés : la fiscalité, l'harmonisation sociale, la circulation des personnes et des services…     Si on veut que l'intégration progresse, il faudra dans ces secteurs fondamentaux supprimer l'exigence de l'unanimité. Car celle-ci est synonyme de veto. Or, dans une Europe à 27 les risques de blocage risquent d'être encore plus importants.

-En second lieu, le nouveau système de pondération des voix dans l'Europe à 27 ainsi que le calcul des majorités qui fait intervenir trois paramètres (parmi lesquels la présence dans la majorité, des Etats représentant 62% de la population risque de conduire à une paralysie totale de la Communauté).

    Une amélioration est difficile à envisager car les Etats sont attachés à la défense de leurs intérêts et le système de la pondération en soi est incontournable ; certes on pourrait simplifier les conditions du vote, mais il faudrait aussi accroître le rôle du Parlement européen dans le processus législatif.

 

4) La constitution- son mode d'élaboration, son contenu.

    Aujourd'hui la quasi-totalité des hommes politiques, si on fait abstraction des " souverainistes " semblent s'être ralliés à cette notion de constitution. A ce sujet les membres du mouvement européen Haute-Garonne/Ariège, ont tenu à faire un certain nombre de remarques.

    Tout d'abord l'idée de constitution n'est pas nouvelle : les traités fondateurs eux-même sont une sorte de constitution de l'Europe ( traité de Rome, de Maastricht, d'Amsterdam) A ce stade, il s'agit d'une simple question de terminologie. On pourrait faire la même remarque à propos du terme de loi, que l'on n'a pas voulu utiliser pour designer les règlements et les directives…     Nous pensons donc qu'il ne faut pas fixer son attention sur le terme, pourvu que le contenu réponde aux attentes des citoyens.

Or, l'objectif essentiel d'une future constitution ou d'un futur traité doit être la simplification et la clarification des textes. Les textes actuels sont illisibles pour les citoyens. Seuls des spécialistes peuvent s'y retrouver… Il faut des textes plus courts qui contiennent simplement les grands principes de fonctionnement de l'Union : La répartition des compétences entre l'Union et les Etats membres, la répartition des compétences entre les diverses institutions et leurs principaux pouvoirs. Les détails de l'organisation européenne pourraient être contenus dans des textes annexes. On pourrait s'inspirer ici du projet Spinelli adopté à l'unanimité par le Parlement européen en février 1984 (texte clair et concis d'environ 10 pages).

    Si la dénomination de constitution ne nous est pas apparue fondamentale, en revanche, elle a une grande valeur symbolique, qui dit constitution, dit Etat et qui dit Etat en matière européenne, dit obligatoirement fédéralisme. Certains d'entre nous voient donc dans l'élaboration d'une véritable constitution l'élément indispensable à l'élaboration d'une véritable fédération européenne.

    Enfin quant à la méthode d'élaboration- le consensus est total : La CIG a montré ses limites à Nice et se relève aujourd'hui particulièrement inadaptée.

    Il faut utiliser une autre méthode qui permets de faire appel aux citoyens, à la société civile et d'éviter les blocages étatiques. On pense évidement au système de la convention qui a parfaitement réussi pour l'élaboration de la charte. Mais d'autres modalités sont possibles : l'initiative du texte peut venir de la commission institutionnelle du parlement européen et ainsi se transformer dans une véritable assemblée constituante…

    Une consultation populaire sur ce sujet pourrait également être organisée sous la forme de referendum. Mais celui-ci ne pourrait intervenir qu'au dernier stade du processus.

 

5) Comment rapprocher l'Europe des citoyens ?

    Un des grands problèmes actuels est la distance sans cesse accrue entre les institutions et l'action communautaire de plus en plus complexes, de plus en plus difficile à comprendre par le citoyen européen.     Pour combler ce qui est en train de devenir une " fossé ", plusieurs démarches sont possibles :

- La reconnaissance des droits des citoyens de l'Union. Elle a déjà été faite dans le traité de l'UE (art.8) et elle est expresse dans la charte des droits fondamentaux adoptés à     Nice au mois de décembre 2000. Ce texte constitue incontestablement un grand progrès dans le sens de la citoyenneté européenne.     Mais il faudrait qu'à l'avenir on lui donne une valeur juridique obligatoire, en en faisant par exemple le préambule de la future constitution européenne.
    Dans le prolongement du droit à un recours effectif contenu précisement dans la charte, il faudrait également que l'on reconnaisse aux citoyens européens le droit de saisir directement la CJCE. Actuellement, l'accès à la Cour ne peut se faire que de manière indirecte. On peut le regretter, d'autant plus que ce droit existe dans d'autres systèmes juridiques internationaux connus (cf. par exemple : le droit de recours direct devant la Cours européenne des droits de l'homme de Strasbourg).

- Il faut aussi clarifier et simplifier les textes communautaires, en particulier les traités. Ce qui devrait être un des objectifs de la future constitution européenne. De ce point de vue, la charte des droits fondamentaux qui est un texte clair et relativement concis(52 articles) pourrait servir d'exemple.

- En France, une réforme du scrutin en vue des élections européennes s'impose : le système des listes nationales permet une emprise totale des partis politiques sur ces élections.     Si on veut rapprocher l'élu de l'électeur, il faut organiser les élections dans le cadre des structures régionales.
    Enfin, mais cette liste n'est pas exhaustive il faut développer les politiques européennes de proximité. Ce qui intéresse les citoyens se sont des actions concrètes qui touchent à leurs vies quotidiennes.

    A l'heure actuelle, par exemple, un des sujets qui préoccupe le plus le citoyen c'est la question de la sécurité alimentaire.     Il est donc urgent, mais la démarche est déjà engagée que l'Europe développe une politique de protection des consommateurs.
    De même les citoyens ne peuvent être indifférents aux problèmes de défense européenne et la mise en œuvre d'une véritable politique en la matière vont dans le bon sens.

    Plus généralement le développement de la citoyenneté européenne passe par une participation plus active des citoyens à l'action communautaire, l'intervention des associations et des ONG à l'élaboration de la charte en a été un bon exemple. Le débat sur l'avenir de l'Union pourrait en constituer un autre, à condition que la consultation des citoyens ne soit pas purement fictive et ne serve pas de prétexte à l'élaboration d'un acte technocratique inspiré en fait par les dirigeants politiques nationaux.


Rapporteur : Christian HEN
Président de la section Hhaute-Garonne/Ariège