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Le 1er juin 2001


Contribution du ME Yvelines
au débat sur l'avenir de l'Europe


 


Préambule :


Le Mouvement Européen des Yvelines a organisé au sein de ses sous sections locales des réunions de concertation et de réflexion sur les réactions et les attentes de nos adhérents et sympathisants à la suite du Conseil Européen de Nice.

Le Gouvernement ayant décidé de lancer un débat national sur les enjeux et les finalités d'une Union Européenne élargie, on peut penser que les réactions exprimées actuellement seront influencées dans les mois qui viennent par ce grand débat auquel nous ne manquerons évidemment pas de participer activement. Les réflexions rapportées ci dessous sont donc susceptibles d'évoluer.

En raison du peu de lisibilité pour le grand public des réformes institutionnelles décidées à Nice, et des commentaires divers qui en ont été faits dans les media, la réaction la plus générale est l'inquiétude devant un élargissement à 27 dont on ne voit pas clairement quelles seront ses conséquences sur la vie quotidienne de chacun. De l'avis général l'opinion s'étonne et s'inquiète de ne pas comprendre où on veut la mener.

Le document du Mouvement Européen France " Préparer activement l'échéance de 2004 " qui nous a été adressé brosse une analyse très pertinente du devenir de l'Europe après Nice.

Cependant, avant de répondre directement aux questions posées qui concernent essentiellement les moyens à mettre en œuvre pour obtenir une Union Européenne viable à 27 ou 30, il paraît nécessaire de définir d'abord clairement quelle Europe nous voulons construire, quelle est l'Europe que nous voulons.

Il ressort de nos réflexions que pour recueillir l'adhésion des peuples appelés à constituer l'Union Européenne, et cette adhésion sera indispensable, il faudrait :

1. Eriger en socle de nos institutions les valeurs universelles de liberté, d'égalité devant la loi, de solidarité, et les principes de démocratie et d'Etat de droit. Pour cela, donner une force contraignante à la Charte des Droits Fondamentaux de l'Union, et prévoir en outre un mécanisme de révision permettant d'ajouter de nouveaux droits.

2. Fixer les objectifs de l'Union à moyen et long terme.
Ceux qui sont considérés comme fondamentaux sont notamment :

La paix en Europe (stabiliser l'Europe centrale)
La paix pour l'Europe (à l'extérieur)
La sécurité des personnes et des biens
L'emploi (par le développement de l'économie et des échanges)
La distribution équitable des richesses
La protection sociale
Le respect des identités (préserver les diversités culturelles)
La préservation de l'environnement

Enfin il devrait être proclamé que l'objectif de l'Union n'est pas de devenir une puissance hégémonique dans le monde

3. Poser les principes qui présideront à l'architecture institutionnelle de l'Union, et notamment :
è L'architecture institutionnelle sera celle qui permettra d'atteindre au mieux les objectifs fixés en respectant les valeurs fondamentales.

- Le pouvoir de proposer une constitution devra être donné (sur le modèle de la " convention ") à un organisme dans lequel siègeront des représentants : des gouvernements nationaux, des Parlements nationaux, de la Commission, et du Parlement Européen. La société civile organisée devra y participer également avec voix consultative.
-Cette constitution, incluant la Charte, devra être ratifiée par les populations de tous les Etats (membres et candidats).
-Les transferts de compétences seront réalisés selon les principes d'efficacité du management, c'est à dire en ne déléguant à l'échelon supérieur (l'Union) que ce qui ne peut pas être fait aussi bien à l'échelon inférieur (national) : c'est le principe de subsidiarité. En conséquence tout ce qui n'aura pas été explicitement délégué à l'Union devra rester de la compétence des Etats membres.
- La démocratie sera représentative, mais en prévoyant une coopération plus étroite avec la société civile organisée.
- Elle respectera strictement le principe de la séparation des pouvoirs.
- L'équilibre entre les pouvoirs exécutif, législatif, judiciaire sera instauré avec des procédures de règlement en cas de conflit.
- Toutes les procédures devront être transparentes pour le public.

4. Demander l'adhésion des peuples aux dispositions ci dessus par voie démocratique (référendum ?)
En effet il parait vraisemblable qu'une fois ces valeurs, objectifs, et principes proclamés et adoptés légalement par les populations des Etats membres (et candidats), on y verrait plus clair pour discuter et négocier sur les institutions qui ne sont que la définition des moyens à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs en respectant les valeurs et les principes.

Les points évoqués ci-dessus donnent déjà, si on y adhère, des éléments de débat et de réponses aux 4 questions posées par le Gouvernement pour le débat national ; ainsi on pourrait schématiquement répondre :

1°/ La délimitation des compétences entre les Etats membres et l'Union ?
En fonction des objectifs fixés, et en respect du principe de subsidiarité

2°/ Le rôle des Parlements nationaux ?
Participer à l'élaboration de la constitution, à la décision des délégations de compétences, adapter la législation de l'Union, légiférer sur tout ce qui ne lui a pas été explicitement délégué.

3°/ La simplification des traités européens ?
en dotant l'Europe d'une constitution

4°/ Le statut de la Charte ?
en préambule de la constitution, avec possibilité de sanctions

 


Les réponses aux questions posées par le Mouvement Européen France :


1°/ Quelles politiques communes conduire à 27 ?

Si l'on adopte les objectifs et les priorités ci dessus, les politiques communes à conduire, in fine, à 27 concernent :
La politique extérieure, la défense, la sécurité,
la politique économique, agricole
la fiscalité et la politique sociale
la politique culturelle
la politique de l'environnement
Cependant en raison de l'hétérogénéité des pays candidats, des coopérations renforcées devront pouvoir être mises en place temporairement pour accélérer la construction de l'Union entre les pays qui pourront y prétendre. C'est là un problème technique.
Le contenu de ces politiques à mettre en commun devra être défini, en appliquant le principe de subsidiarité, par les instances qui en auront constitutionnellement la charge : c'est à elles, et non au simple citoyen, de faire des propositions respectant les objectifs et principes définis ci dessus. Tel est bien le rôle des représentants du peuple, dans le cadre du mandat qui leur est confié. Ces propositions devront être ratifiées par les Parlements nationaux et au besoin par référendum.

2°/ Comment renforcer la place de l'Europe dans le monde ?

Compte tenu de l'importance de son marché intérieur en fonction du nombre de sa population et de la libre circulation des personnes et des biens, l'Europe aura la place qui lui revient dans le monde si elle affiche une détermination politique avec des valeurs et des objectifs clairement identifiés. Tant que les citoyens européens eux mêmes ne verront pas où on veut les mener, il ne sera pas étonnant que les pays non européens n'aient qu'une confiance limitée en l'Union.
D'autre part il est important que l'Europe dispose d'une force de défense, et la décision de Nice marque, à cet égard, une étape importante. Encore faudrait il que l'on définisse précisément quelles seront les missions de cette force, dans quels cas elle agira seule ou en collaboration avec l'OTAN, et dans quels cas elle pourrait ou non agir sous commandement de l'OTAN.

3°/ Comment améliorer les mécanismes de décisions décidés à Nice ?

Il est évident qu'il faut élargir, voire généraliser le vote à la majorité qualifiée. Mais l'essentiel nous paraît être de clarifier les objectifs. Ce sera ensuite la nouvelle constitution, élaborée comme indiqué ci dessus, qui fixera les mécanismes de décision.

4°/ Quel sens donner au projet de constitution dont la charte serait le préambule ?

La constitution devra à la fois fixer les valeurs (la Charte), les objectifs, et les institutions mises en place pour les respecter et les atteindre.
En ce qui concerne la négociation des traités, il est évident qu'il faudra y associer les Parlements nationaux, et que des liens (peut être sous forme d'organismes consultatifs) devront être établis avec la société civile organisée.

5°/ Quel usage faire des coopérations renforcées, avec qui, sur quels sujets ?

Si cela permet à un groupe de pays de construire plus rapidement un ensemble cohérent dans les domaines jugés essentiels, pourquoi pas ? Mais ce serait aux pays qui ne voudraient pas, ou qui temporairement ne pourraient pas, satisfaire à certaines dispositions, de demander à rester dans l'Union tout en ne faisant pas partie du groupe de tête. C'est en fonction des négociations qu'on pourra en décider.
Comment obtenir que ces coopérations conduisent à la formation d'une avant garde cohérente ?
En les négociant avec des pays suffisamment homogènes.
Comment éviter dans une Union élargie que le droit de veto sur la révision des traités ne conduise à l'immobilisme ?
En rendant certains points des traités révisables sous certaines conditions, ou en permettant à certains Etats de sortir de l'Union s'ils ne sont plus d'accord..

6°/ Comment rapprocher l'Europe du citoyen européen ?

En mettant en place des procédures transparentes, en diffusant une information claire et aussi objective que possible, en parlant au citoyen un langage qui ne lui apparaisse pas ésotérique.


Conclusion


Ces réflexions constituent plus une synthèse des réactions de nos adhérents que des réponses précises aux questions posées dans le document du M.E.F. Elles sont cependant représentatives des attentes exprimées et nous semblent à ce titre pouvoir contribuer à nourrir un débat sur le devenir de l'Union Européenne.

Le Président du ME Yvelines
J.L. GASQUET